Carrière

« Wife bonus » ou le bonus des femmes au foyer


Béatrix Foisil-Penther
Vendredi 5 Juin 2015




Il n’est pas question ici de Desperate Housewives. Au contraire ! Aux États-Unis, certaines épouses d’hommes aisés, arrêtent de travailler, essentiellement pour coacher leur progéniture. Plus étonnant, elles peuvent toucher des primes annuelles...


Cela s’appelle le Wife bonus. C’est aux épouses riches (américaines et urbaines), l'équivalent du bonus des traders. Explication : l’anthropologue Wednesday Martin a mis à jour une pratique étonnante : la rétribution d’une épouse par son mari fortuné pour ses bons et loyaux services. Comprendre, faire entrer Junior dans une des meilleurs écoles (cela se prépare dès l’âge de quatre ans), l'emmener à son cours de chinois, au musée, bien gérer le budget familial, sociabiliser et réseauter intensivement pour s'ouvrir les meilleures portes…
 
Cela se passe à New-York, principalement dans l’Upper East Side, quartier de Manhattan qui rassemble au mètre carré, le plus de fortunes, et où « on paie le plus d’impôts » rapporte Guillemette Faure dans M Le Magazine du Monde. Ce phénomène anglo-saxon, pour le moment, touche des femmes ultra diplômées. De plus, elles ont coché toutes les bonnes cases, dont celle d’épouser un mari riche. Mais voilà, après avoir travaillé dans des banques d’affaires ou des cabinets de conseils prestigieux, elles abandonnent leurs jobs pour se consacrer à leurs enfants. Aucune frustration ici : elles s’engagent dans une nouvelle carrière, celle de coacher Junior. Et pour cela, certaines touchent des bonus, ou des primes annuelles, peu importe le nom, versés par leurs maris. On est dans le business pur, une prime puisque les objectifs sont atteints !
 
C’est ce qu’a révélé l’anthropologue Wednesday Martin dans le New York Times le mois dernier. Loin de la caricature de mégère même apprivoisée, on appelle ces femmes au foyer par choix, des Glam SHAM, acronyme de Glamorous stay-at-home-moms. Finalement, c’est une illustration de la « production combinée du ménage », si on s'appuie sur la théorie du Prix Nobel d’Économie (1992) Gary Becker. Un simple calcul et la logique économique prime, en somme. D’ailleurs, M rapporte l’analyse ultra fine de la chroniqueuse Maureen Dowd : « si les femmes sont moins nombreuses à parvenir au sommet, c’est parce qu’elles n’ont pas de femmes. » CQFD.
 
Les Glam SHAM prennent en main la destinée de leurs bambins promis à un bel avenir : elles « se comportent comme les coachs de leurs enfants et jugent impossible de sous-traiter l’entraînement de leur progéniture à une nounou philippine », explique à M, la directrice de l’ENA, l’École Nationale d’Administration, Nathalie Loiseau et auteur de l’excellent essai, Choisissez tout, paru chez Jean-Claude Lattès en 2014. Evidemment, cette « réalité » économique, n'apparait pas très réaliste pour beaucoup. Et dans les faits, elle a tendance à creuser les inégalités. « Il se forme une nouvelle inégalité entre les familles où un parent peut suivre de près ses enfants et les autres », dit encore Nathalie Loiseau. On espère que ce papier ne donnera pas trop d’idées aux housewives françaises, urbaines, aisées et désespérées…


Dans la même rubrique :