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La parisienne parfaite est une…


Mardi 10 Février 2015





À contre courant de l’unanimité actuelle, « La vraie parisienne » d’Anne Plantagenet est un roman grinçant. Il tord le cou aux idées reçues très en vogue en ce moment, comme quoi la parisienne serait parfaite.


La parisienne parfaite est une…
À croire le Landerneau littéraire, la presse branchée et divers statements mode, la parisienne est une créature au chic sans faille. Mais un chic effortless. Autrement dit, inné et naturel. Elle est belle sans en faire des tonnes. Surtout sans passer des heures dans sa salle de bain ou dans une salle de sport. On ne va pas s’étendre davantage. Le sujet, on le connaît. Dans le sillage du best seller (non traduit en Français), How to be Parisian wherever you are : Love, Style, and Bad Habits par Caroline de Maigret et consorts, (Knopf Doubleday), la parisienne est érigée en créature culte. Plus encore, elle suscite tous les désirs.
 
Dans un opus jubilatoire, La vraie parisienne, Anne Plantagenet prend cette évidence à contrepied. L’auteur de Nation Pigalle et plus récemment, de Trois jours à Oran (Stock), dresse le portrait d’une douzaine de parisiennes susnommées. Mais elle les passe à la moulinette. Résultat, la perfection innée n’est plus de mise. À la lecture, on en vient à douter : la chose parfaite existe t-elle vraiment ? Et si oui, est-elle enviable ? Anne Plantagenet épingle Caroline, Chloé, Charlotte et Louise, entre autres, jusqu’à en faire des caricatures. Caricatures adeptes de Pilates ou de waterbike. L’une est avocate, l’autre actrice sur le retour. L’une boit un peu trop, une autre est finalement beaucoup plus seule qu’elle n’en a l’air…

Les uns après les autres, ces douze portraits composent un autre genre de comédie humaine. Mais elle est acerbe et loin du prisme glamour et sans effort de Caroline de Maigret. Anne Plantagenet démythifie à vitesse grand V. Elle distribue claques et coups de griffes. Pour elle, la parisienne n’est pas cette femme à la fois élégante et rock, mince et qui s’enfile un verre de rouge et un jambon beurre au comptoir. Elle est loin de cette image, celle qui porte une « petite robe noire et trench mastic, perchée sur 12 cm de talons, toujours entre deux taxis, attablée à la terrasse du Flore, se demandant à quelle soirée mondaine elle va se rendre. »
 
Dans ce roman choral, Anne Plantagenet décrit des femmes qui ont secrètement peur de ne pas être à la hauteur. Des femmes de notre époque, dignes des héroïnes cabossées de Robert Altman. L'auteur, qui se confond parfois avec la narratrice, repère le bas filé sur la parfaite silhouette, agrandissant l'accroc avec élégance et une petite dose de cruauté. Comme quoi, la vraie parisienne est moins parfaite qu’elle n’y paraît.

La vraie parisienne, Anne Plantagenet, (J'ai lu).




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