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Petits précis des créateurs japonais en France


Mercredi 29 Avril 2015





Cette année, la franco-allemande Annelie Schubert a été sacrée au Festival de Hyères. Derrière elle, une cohorte de designers allemands et néerlandais. Pas de japonais donc. En revanche, Paris reste « the place to be » pour les créateurs japonais.


Yohji Yamamoto
Yohji Yamamoto
En 2014, le japonais Kenta Matsushige avait remporté le Festival international de mode et de photographie de Hyères. Cette année, point de Japonais dans le trio de tête, mais des allemands et des néerlandais. Pourtant, la France et Paris en particulier, reste une terre promise pour les designers japonais.

Tiffany Godoy, experte en matière de mode japonaise, auteur et contributrice entre autres, de Style.com explique à M Le Magazine du Monde : « à travers l’histoire contemporaine, la mode japonaise a fasciné la France et inversement. » Avec une différence capitale qui fait sans doute beaucoup dans la fascination réciproque : la relation au corps et aux vêtements, diverge totalement.
 
En France, la mode porte davantage la marque d’un sexe. Elle est « sexuée » en somme. Au Japon, en revanche, souligne encore Tiffany Godoy, « le vêtement domine le corps. » L’esprit qui prévaut est unisexe et l’habit, plus un marqueur social qu’un vêtement pour homme ou femme. Malgré cette approche antinomique, les designers japonais vont faire de l‘hexagone, leur terrain de jeux privilégié. À partir des années 60, ils vont obtenir un succès, à la fois commercial et d’estime. 
 
Avec une vision souvent extrême et leur savoir-faire chiadé, les couturiers japonais vont s’imposer en France. Le point culminant est atteint dans les années 80, avec la tête pensante et ultra conceptuelle de Comme des Garçons, Rei Kawakubo. Elle imagine une mode cérébrale, aussi noire que des peintures de Pierre Soulages. Ses pièces redéfinissent le luxe et la féminité tels que nous les connaissions. Aujourd'hui, les créateurs japonais continuent leur percée en France. Le dernier en date, le jeune Kenta Matsushige a donc été courounné à Hyères l'année dernière. 
 
Dans l’intervalle, on a vu défiler des pointures qui ont révolutionné notre approche occidentale et peut-être plus rationnelle de la mode. Sans vouloir faire catalogue, on peut citer Kenzo Takada dans les années 70. Précurseur du boho ou de l’hippy chic, de l’ethnique chic ou du melting pot folklorique entre Inde et Maroc. Une mode métissée dans tous les cas, loose et ne se prenant pas au sérieux.
 
À la même époque, Issey Miyake s'installe à Paris. Ultra technique, il travaille sur le mouvement, le corps et développe des plissés savants, certains à mémoire de forme. Il emprunte des détails ou des matières au sport et à ses codes performants. Ses créations sont innovantes, radicales, architecturées.

Au début des années 80, Yohji Yamamoto s’inscrit dans le sillage avant-gardiste et intellectuel de Rei Kawakubo avec une mode déstructurée et urbaine, sans genre spécifique, dirait-on ces jours-ci. Il camoufle le corps des femmes sous des volumes XXL et des formes oversized. Aujourd’hui, la japonaise Chitose Abe et sa marque pointue Sacai tire son épingle du jeu avec des créations hybrides, doubles : tartan et cuir, broderies anglaises et tissus techniques. Plusieurs esprits cohabitent pour donner des vêtements fonctionnels. Hautement désirables et portables. C'est sûr, elle prend la relève.

Sacai
Sacai




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